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Satan (LP)

MONSTER MELODIES RECORDS (2016)

Parution sur le label Monster mélodies de l’album légendaire de Satan enregistré en 1973. Un must de la musique française progressive, resté inédit depuis quarante-trois ans. 

 

Édition de luxe  1000 exemplaires numérotés, en vinyle couleur, avec poster et inserts.

BIOGRAPHY:

C’est en 1968 qu’André Beldent dit Macson, forme le groupe The New Rainbow en compagnie de plusieurs autres étudiants du Mans. Si ces jeunes normaliens se destinent à une carrière d’enseignants, ils rêvent au blues et au rock & roll qui constituent une passion dévorante depuis leur adolescence. Leurs modèles ont alors pour nom John Mayall, Ten Years After, Cream, Fleetwood Mac ou Aynsley Dunbar Retaliation.

 

Très rapidement le groupe change son nom en Heaven Road et se stabilise autour d’une mouture resserrée : André « Macson » Beldent (guitare, vocaux), Richard « Sam » Fontaine (basse, vocaux), Christian « Kicks » Savigny (batterie, chant), et Michel « Chouchou » Chevrier (sax, flûte). Aux claviers se succèderont Christophe Plettner, puis Alec Richard et enfin Jérôme Lavigne, qui intègre le groupe en mai 1972. Le poste de chanteur sera occupé (jusqu’en septembre 1973 et de façon discontinue pour cause d’obligations militaires) par Jean-Louis « Miror » Briand. 

 

Le répertoire du groupe, à l’origine quasi-exclusivement composé de covers, se voit enrichi de premières compositions personnelles qui laissent entrevoir l’évolution de l’inspiration des musiciens qui passent du british blues boom pur et dur à des univers plus progressistes sous l’influence de Pink Floyd, Soft Machine, Jethro Tull, Colosseum ou encore Led Zeppelin, pour ne citer que quelques noms.

 

Formation-phare de la scène mancelle, Heaven Road s’impose également à Paris au Golf Drouot où il se produit à six reprises et dont il remporte les tremplins par trois fois entre janvier 1971 et décembre 1972, se voyant également consacré meilleur groupe semi-professionnel de l’année 1972. L’on retrouvera également Heaven Road à l’affiche d’évènements restés fameux, tels que les festivals de Malicorne en mai 1971 ou celui de Saint-Gratien en juin 1972. C’est à ces occasions que le groupe fera la rencontre de formations légendaires de cette époque, Variations, Magma, Il Etait Une Fois, Catharsis, Ange ou encore Dynastie Crisis. 

 

Le destin de Heaven Road va connaître une évolution déterminante au milieu de l’année 1973 lorsque, à l’initiative de parrains bienveillants tels que Henri Leproux, célèbre gérant du Golf Drouot, ou le producteur Jacky Chalard, bassiste de Dynastie Crisis, il adopte un nom français et se rebaptise Satan, faisant du même coup évoluer son image vers des univers plus sombres et mystérieux. Satan développe une formule musicale et sonore qui doit autant au hard-rock qu’à l’influence de la scène progressive symphonique alors en vogue, tandis que l’imaginaire du groupe fait la part belle aux ambiances inquiétantes, aux images oniriques, au monde du rêve et du parapsychologique, avec une importante part d’inspiration tirée de la littérature et en particulier de la science-fiction. Le jeu de scène de Satan est à l’avenant : maquillages et costumes choisis viennent renforcer des éclairages et une scénographie d’un professionnalisme tel que le groupe s’impose à la pointe de la scène régionale et nationale. Une nouvelle victoire au Golf Drouot en décembre 1973, suivie d’un reportage sur FR3 Le Mans quelques jours plus tard, ainsi qu’une série de dates en ouverture du prestigieux groupe britannique Caravan en mai-juin 1974 confirment l’envergure grandissante de Satan, néanmoins le groupe peine à vivre de sa musique et ne parvient à concrétiser aucun de ses projets d’enregistrement. A cette époque en effet, Henri Leproux n’hésite pas à les présenter comme « le meilleur groupe français qui n’ait pas encore enregistré ».

 

A l’été 1974, les musiciens doivent se résoudre à diversifier leur activité et montent une formation exclusivement dédiée au circuit des bals, Ciel d’Eté, laquelle stabilisera rapidement leur situation financière, tout en leur permettant de gagner en autonomie et par-là même conserver une certaine liberté vis-à-vis des sollicitations dont ils font l’objet de la part du show-business et qui les auraient amenés à des compromissions artistiques qu’ils refusent farouchement. En quelques mois, ils déclinent en effet un certain nombre de propositions, playbacks télévisés derrière des vedettes du moment ou figuration dans le projet Les Rockets. 

 

C’est dans ce contexte que le groupe effectue en quelques mois, deux passages successifs au fraîchement inauguré Studio 20, basé à Angers et géré par le jeune ingénieur du son Richard Loury. Si les premières sessions, assez brèves, aboutiront aux deux titres d’un 45-tours de Ciel d’Eté, les secondes s’étendront sur près d’un mois, durant lequel le groupe prend ses quartiers au Studio 20, ne s’en échappant que pour aller satisfaire les obligations contractuelles de Ciel d’Eté. Bénéficiant ainsi de conditions idéales en termes de temps, de confort et d’environnement technologique, le groupe va pouvoir travailler la matière de ses créations à travers une production méticuleuse où les arrangements et le travail sur le son donnent leur pleine mesure à des compositions rodées sur scène depuis déjà trois ans pour certaines d’entre elles. En ressort une bande de sept titres, qui doit très logiquement constituer la base d’un album. 

 

Pour la réalisation de son album, Satan avait pris le parti de s’écarter du schéma traditionnel de l’époque qui voulait qu’un groupe signe d’abord un contrat avec une maison de disques laquelle organiserait et financerait ensuite l’enregistrement d’un disque, avec généralement une direction artistique imposée par le label. Toujours du fait d’une volonté d’indépendance non-négociable, le groupe a fait le choix de l’autoproduction, ce qui l’amène tout naturellement à effectuer un démarchage intensif des labels parisiens pour leur proposer la distribution de l’album. Malheureusement, ces démarches resteront infructueuses, les musiciens faisant l’expérience de la frilosité des distributeurs devant un genre musical au faible potentiel commercial, et pour lequel la seule visibilité semble principalement accaparée par les belfortains de Ange.

 

Ce n’est pas tant un certain découragement ou un manque de pugnacité du groupe devant les portes fermées du show-business que le soudain et fulgurant essor de la carrière parallèle de Ciel d’Eté qui entraînera l’abandon du projet de faire publier l’album de Satan. Les engagements toujours plus fréquents de Ciel d’Eté, qui devient à cette époque une formation incontournable de la scène des bals rock du grand-ouest, mobilisent toujours davantage le quatuor, tandis que Satan connait invariablement des difficultés à diffuser un spectacle exigeant et multimédia avant la lettre. Ainsi au mitan de l’année 1976, Satan rend son dernier souffle et son unique album s’en ira rejoindre la multitude de trésors cachés du rock français de l’époque héroïque.

 

L’album

 

La publication de l’album inédits de Satan est un projet vieux de plus de quinze ans et qui n’est dû qu’à la patience et l’opiniâtreté d’un réseau de passionnés.

 

Les enregistrements de l’album du groupe font une première fois surface en 1993. Ceux-ci, numérisés et retravaillés par deux fois en studio, ont permis la réalisation de cette publication sur le label Monster Melodies Records. 

 

 

Caractéristique du courant progressif symphonique de l’époque, popularisé par de grands noms tels que Genesis en Angleterre ou Ange en France, la musique de Satan n’est pour autant pas dénuée d’une personnalité et de caractère la distinguant des autres formations françaises des années 1970-75 tout en la plaçant parmi les meilleures d’entre elles. Qu’il s’agisse de ses compositions, des qualités d’instrumentistes de ses musiciens ainsi que des choix de production opérés, tout concourt à montrer que cet album, fût-il sorti à l’époque de sa réalisation, aurait pu s’imposer comme une référence au même titre que les meilleurs albums de grands noms tels que Ange, Mona Lisa, Carpe Diem, Atoll ou Pulsar.

 

Qu’est-ce qui fait la singularité de Satan ? Tout d’abord cet équilibre constant entre tension et souplesse, entre puissance et finesse, entre fougue et retenue. Ensuite une construction très développée de compositions qui témoignent d’une volonté de recherche tant dans le propos que sur le métadiscours, à travers une approche qui privilégie les ambiances propices à la construction d’images, à la manière des illustrations sonores pour le cinéma, dont le groupe s’est toujours déclaré se sentir proche. Des travellings vertigineux au-dessus des paysages de glace dans « La Nuit des Temps » au cauchemar halluciné de l’ouvrier de chez Renault dans « O.S. », en passant par les menaces de la marche martiale implacable de « L’Aigle », il se crée entre Satan et son auditeur une relation profonde, où les musiciens sollicitent l’imaginaire de celui qui écoute et créent les conditions d’un véritable voyage en images, au-delà du texte. 

 

Enfin, la qualité du groupe passe aussi par celle de ses musiciens. Inspirés et exigeants mais conscients de leurs limites, ils mettent leur savoir-faire au service d’une ambition sincère, en cherchant au maximum à se libérer de leurs influences pour se créer une propre personnalité. Ainsi se dessinent des profils remarquables, la finesse et la précision du jeu de guitare acéré d’André Beldent, la virtuosité touchant à l’exubérance dans les claviers foisonnants de Jérôme Lavigne, et le dynamisme tout en souplesse de la solide section rythmique incarnée par Christian Savigny et Richard Fontaine. Le travail vocal constitue un autre point fort, explorant une palette aussi large que celle qui va du murmure au cri et de l’emphase au recueillement, avec des timbres bien distincts et judicieusement exploités, ainsi que des harmonies vocales soigneusement construites.

 

Que sont-ils devenus ?

 

André « Macson » Beldent :

Fondateur du groupe et figure centrale de celui-ci depuis sa création, « Macson » tel que le connait le public sarthois, est toujours actif sur la scène rock locale. Après avoir mené entre 1974 et 1987 plusieurs line-up successifs de Ciel d’Eté (dans les rangs desquels se succédèrent quelques-uns des meilleurs musiciens du cru, parmi lesquels Francis Petit, futur chanteur du légendaire groupe de métal Warning), il a poursuivi l’aventure avec Macson Le Groupe, trio de covers rock et blues. En mai 2016, il donnait son premier concert avec Blues Legend, un autre trio au répertoire d’adaptations de standards du british blues boom, renouant ainsi avec ses premières amours et bouclant par-là même la boucle près de cinquante ans après ses débuts sur les planches.

 

Christian « Kicks » Savigny : 

Après son départ de la première mouture de Ciel d’Eté en 1978, et tout en restant actif en tant que batteur (on le retrouve notamment dans le groupe Le Mans en 1978-79 aux côtés de la chanteuse Marie Davoust), Christian Savigny montre qu’il possède plusieurs cordes à son arc. Il devient d’abord DJ, crée ensuite sa propre discothèque puis s’accomplit dans son autre passion, la radio. Il participe ainsi à la grande aventure des radios libres du début des années 1980, époque à laquelle il devient l’un des piliers de l’aventure RFM. Concepteur de projets et spécialiste reconnu il s’impose comme un directeur des programmes recherché, d’abord chez Chérie FM, puis Europe 2 et enfin Nostalgie. A la pointe des évolutions du format radio sur le web, il s’illustre aussi à la télévision sur la chaîne câblée Télé Mélody dont il sera le directeur des programmes emblématique entre 2001 et 2013. Toujours batteur, Christian Savigny a participé à la reformation de Ciel d’Eté en 2012 pour deux concerts exceptionnels et se produit régulièrement avec la formation parisienne Les Skro.

 

Richard « Sam » Fontaine : 

Bassiste historique de près de toutes les moutures du groupe depuis 1969, Richard Fontaine (à ne pas confondre avec le musicien homonyme, ex-Alan Jack Civilization et Tribu) est retourné à sa première vocation d’enseignant au début des années 80, devenant un instituteur spécialisé reconnu par ses pairs et les élèves. Il participe à la reformation en 2012 de Ciel d’Eté dans lequel il fait montre du même plaisir de jouer et d’une passion intacte. 

 

Jérôme Lavigne : 

Après avoir quitté la première mouture de Ciel d’Eté en 1978, Jérôme Lavigne, musicien reconnu sur la scène sarthoise, forme d’abord son propre orchestre de bal, OK, puis rachète à Christian Savigny sa discothèque Le Shadok dont il fera l’un des lieux les plus en vue, notamment pour les spectacles qu’il y donne en tant que musicien mais aussi pour son implication dans la vie locale. Connu pour sa générosité, il apporte son soutien à plusieurs groupes rock locaux comme Opale ou Bloody Mary, qui l’invitera à participer en tant qu’invité à son unique 45-tours, enregistré en 1979. Personnalité sensible et complexe, Jérôme Lavigne se donne la mort en 1987.

 

 

 Julien THOMAS

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